Alors qu'aujourd'hui le prestige d'une pipe s'exprime plutôt dans la texture du bois de Bruyère et l'harmonie, la hardiesse ou l'équilibre de ses formes, il y eut une époque où l'on traduisait cette majesté par la complexité de sculptures ou dans l'ornement et en particulier, comme le montre cet article, celui des couvercles.

Les pipes en écume de mer étaient au premier rang quand il s'agissait de montrer la richesse de l'objet à travers le chapeau qui couvre le fourneau.

Au fond, cet accessoire brille moins par son utilité que par sa capacité à y condenser les signes extérieurs d'opulence. Feuilles d'Acanthe et fleurs de Lys cisellées, ajours et évents sophistiqués, pierres precieuses ou calloux du Rhin enchassées, fermoirs ouvragés, frises, dentelles d'argent, d'étain, dorures et j'en passe...

Accuser aujourd'hui ces pipes de lourdeur, de surcharge, de biscornu serait un anachronisme. Elles sont le témoin de critères esthétiques en perpétuels changement et je tenais simplement à les présenter en tant que tel.

Sans doute considérera-t-on dans un siècle, nos goûts actuels avec le même amusement que celui que nous montrons en contemplant ces quelques images.

Ces pipes témoignent de la tendance qu'on avait à considérer un outil, fut-il de fumage, non seulement sous son angle utilitaire, son ergonomie, son efficacité, mais comme un support d'expression pour l' artisan qui le réalisait.

Elles sont issues de la collaboration entre pipiers, orfèvres et joailliers : le fourneau de la pipe n°1 est incrusté de cinquante pierres précieuses, le couvercle quant à lui en a reçu deux.

La "décoration" de l'objet le disputait aux caractéristiques de fumage. On ne décore plus les pipes qu'exceptionnellement. On cherche a créer un tout cohérent, homogène, épuré, où la forme contribue aux qualités de fumage. Mais cela aussi n'aura qu'un temps.