Un talon coquin

Les pipes en argile ont la réputation justifiée de chauffer beaucoup au point de ne pas pouvoir être tenues par le fourneau quand on les fume. C'est pourquoi elles sont très souvent munies d'une petite excroissance sous la tige pour être maintenues à cet endroit-là. La température y est plus supportable. Accessoirement cette excroissance peut servir aussi de reposoir.

Les pipes en racine de Bruyère n'arrivent pas à de telles températures si on fume raisonnablement. Le petit talon n'a donc plus de raison d'être.

Ajoutez à cela les complications lors de la fabrication dues à la multiplication des opérations que cela induit, on arrive à une situation où les avantages de l'appendice passent au second rang et la chose fut assez vite abandonnée pour les pipes en bois ordinaires.

Mais il y a quelques exceptions...

Partant de la constatation que l'endroit est très discret, un esprit imaginatif a eu l'idée d'ajouter une "plus value" à ce talon en y logeant un détail qui pourrait faire vibrer une population majoritairement masculine de fumeurs.

L'originalité de la chose c'est qu'on accède à cette "plus value" un peu à la manière du voyeur qui lorgne à travers un trou de serrure.

Un dispositif optique composé essentiellement d'une loupe subtilement intégré à notre talon permet de se régaler de quelque icône affriolante.

Par pur souci de précision, je mets un point d'honneur à vous en révéler un exemple. C'est comme si vous y étiez.

Le dispositif optique qui apparut au milieu du 19ème siècle est connu sous le terme anglais Stanhope^[1]. L'usine qui fabriquait le système^[2] combinant la lentille et une microphotographie se trouvait à Gex (France). La proximité de Saint Claude et de Gex explique l'adaptation du dispositif aux pipes.

Les Stanhopes garnissaient aussi des stylos, des chopes à bière, des sifflets, des archets de violon, des bagues et même... des chapelets.